Coliving : de quoi parle-t-on ?
Le coliving, c’est la colocation du XXIe siècle. Vous avez forcément entendu parler de cette colocation version 4.0 ! Ce concept du vivre ensemble est toujours présent, la liberté en plus. Il en existe de multiples déclinaisons. Pourquoi cet engouement pour ce qui ressemble – a priori – à une version hype de la colocation ?
Coliving : quelle définition ?
La définition la plus large du coliving n’a rien de bien nouveau. Il s’agit de vivre dans un logement partagé avec d’autres personnes qui ne font pas partie de votre famille.
Vivre ensemble, oui… mais pas n’importe comment ! Ni n’importe où ! Le coliving, c’est un logement partagé, clé en main, tout compris. Cela signifie que ses habitants, les colivers, arrivent dans un logement design et pensé pour leur confort. En résumé, pour vous installer dans un coliving, expliquent les opérateurs et les gestionnaires, vous n’avez besoin que de votre valise et de votre ordinateur.
Le loyer, un peu plus élevé par rapport à une colocation classique, couvre les charges courantes : le wifi, l’entretien, les réparations, la fourniture des utilitaires et bien d’autres services.
Dans les logements, les colivers disposent chacun d’une chambre et d’une salle de bain privative. Certains coliving intègrent même des kitchenettes. D’autres proposent des studios, voire des T2 dans leurs résidences.
Mais ce qui fait la force du coliving, ce sont les espaces partagés : grande cuisine, salon, parfois salle de sports, home cinema, jardin, roof top. Certains coliving conçus dans des immeubles ou des bâtiments entiers proposent aussi des espaces de co-working et/ ou de restauration ouverts sur l’extérieur et la vie du quartier.
Est-il facile d’intégrer un coliving ?
Oui ! C’est l’un des grands avantages de ce mode de logement, flexible et plutôt urbain. Dans la plupart des grandes villes, trouver un logement est long, difficile. Le parcours du combattant !
Le coliving dépoussière le système : il n’est pas question de caution solidaire. Tout est simplifié au maximum.
Vous vous inscrivez en ligne, envoyez quelques informations et votre date d’arrivée souhaitée. De votre inscription à la signature du bail, le processus est – de plus en plus souvent – digitalisé. Et les baux sont flexibles : un mois de préavis suffit du fait que ce sont des baux meublés.
Est-ce que le processus est moins humain pour autant ? Non. Les bailleurs du coliving organisent une rencontre par visio, par téléphone et le plus possible en présence avec les candidats. « Cela nous permet de voir s’ils ont bien conscience qu’ils vont vivre en communauté et de ce que cela implique » explique Nicolas Legay, cofondateur de Many Many, un opérateur de coliving présent au Luxembourg, en Belgique et en France.
Certains opérateurs comme La Casa, ou Santafe à Antony, organisent des rencontres autour de soirées entre les candidats et les résidents : une étape importante pour assurer l’harmonie dans le logement partagé.
Le coliving, un petit frère du coworking ?
À ses débuts, le coliving était associé aux entrepreneurs, start-upers et autres geeks qui travaillaient 20 heures sur 24. C’est sur ce principe que sont nées les hacker houses « où l’on peut travailler en chaussettes ». A noter que ces coliving pour entrepreneurs s’adressent à toutes les bourses. Ils proposent même des chambres partagées afin de réduire les frais. Par exemple, Start Up Embassy, dans la Silicon Valley, est moins un coliving qu’une communauté d’entrepreneurs venus du monde entier, où les gens n’ont aucun problème à dormir dans des chambres partagées tant qu’ils peuvent se rencontrer, échanger et faire du business ensemble. Le lien entre coworking et coliving n’est donc pas un hasard. Station F, l’incubateur et campus dédié aux start up a ouvert un coliving réservé à ses entrepreneurs aux portes de Paris.
Le coliving se réduit-il à une sorte de co-working à la maison ? Ce n’est pas si simple. De nombreuses structures proposent des espaces de travail, ouverts aux non-résidents. Mais les liens ne sont pas aussi étroits. Pour preuve, l’opérateur de coworking américain WeWork a fermé sa filiale de coliving WeLive il y a déjà plusieurs années. Ses résidents, peu nombreux, avaient l’impression de dormir au bureau.
Mais l’association entre coliving et coworking a de beaux jours devant elle. Et fait preuve de créativité. La Mutinerie, un espace de coworking du 19e arrondissement de Paris a ouvert, dans le Perche, la Mutinerie Village. Le concept : permettre aux télétravailleurs, free lance, entrepreneurs de s’échapper quelques jours au vert pour travailler, seuls ou en équipe. Sur le même principe, Ondine Living propose des coliving éphémères pour les freelance et télétravailleurs amoureux de l’océan, qui veulent changer d’environnement sans interrompre leur activité.
Alors le coliving, c’est pour qui ?
A priori, pour tout le monde :
- les étudiants et les jeunes actifs qui peinent à se loger dans des centres urbains hors de prix;
- les salariés en transition professionnelle dans une nouvelle ville où ils ne connaissent personne ;
- de nouveaux célibataires en transition personnelle et qui ne se voient pas vivre seuls ;
- des seniors en pleine forme qui ne veulent plus vivre seuls chez eux ;
- des familles monoparentales qui profitent d’un espace plus grand avec leurs enfants ;
- Et même des familles à la recherche d’un logement de transition.
Le coliving attire donc de plus en plus. Le phénomène est avant tout urbain. Il se diffuse notamment dans les villes grandes et moyennes où se loger est de plus en plus compliqué. « Toutes nos résidences sont situées à moins de 10 minutes des commerces de première nécessité et des transports… En 2022, sur les plus de 600 projets étudiés, nous n’en avons gardé que 20 qui répondaient à ces critères » explique Julien Morville, co-fondateur de Sharies.
Qui sont les colivers ?
Le profil des colivers varie en fonction des opérateurs, des lieux et de l’ambiance du coliving lui-même. Selon l’ensemble des acteurs du marché, les co-livers sont âgés de 18 à 40 ans, voire plus. Mais des tendances se dessinent : Colonies séduit davantage les étudiants ; Sharies accueille essentiellement des actifs urbains entre 25-40 ans, en transition de vie professionnelle, par exemple nouveaux arrivants dans une ville ou un pays.
Car le meilleur moyen de ne pas se sentir perdu dans une ville inconnue est encore choisir de vivre à plusieurs. C’est d’ailleurs le principe de Many Many dont les résidents sont des expatriés venus au Luxembourg pour des raisons professionnelles. « L’arrivée dans un nouveau pays peut être douloureuse, surtout lorsqu’on est seul et confronté à une nouvelle culture, un nouvel environnement. C’est difficile, dans un petit pays comme le Luxembourg, de trouver un logement. Certains expatriés passent des mois seuls en appart’hôtel. Or l’expatriation est une expérience géniale, quand on la partage. Nos colivers vivent avec des gens ayant les mêmes centres d’intérêt ou qui rencontrent les mêmes difficultés. Cela facilite les échanges et rend l’expérience plus agréable. »
C’est d’ailleurs l’une des originalités du concept. « Bien sûr, chez Many Many, nous sommes là pour accompagner les expatriés, quelles que soient leurs demandes. Mais les colivers s’entraident beaucoup entre eux. C’est ce qui rend l’expérience unique. »
De nouveaux publics dans les coliving
Signe des temps, le coliving s’adapte aux modes de vie actuels et à de nouveaux publics. Les parents solos représentent un quart des familles en France aujourd’hui. « C’est l’éléphant dans la pièce, explique Tara Heuzé-Sarmini, la co-fondatrice de Commune, premier coliving urbain dédié aux familles monoparentales. Nous apportons une solution pour un public délaissé, qui a des besoins spécifiques à un moment donné. » Chez Commune, vous trouverez par exemple des espaces de jeux, de l’aide aux devoirs pour les enfants, une aide juridique pour les parents. Autres avantages du coliving monoparental : les parents ne sont plus isolés avec leurs enfants, mais peuvent échanger entre eux et s’entraider. Le pouvoir de la communauté prend alors tout son sens.
Des locataires à moyen terme
En moyenne, les colivers restent de 6-18 mois, tous coliving confondus… En moyenne. « Dans la communauté COOLOC nos colivers restent en moyenne 13 mois et ceci est notre moyenne nationale petites villes et campagne compris » raconte Virginie Perret, fondatrice de COOLOC, plateforme sécurisée qui référence toutes les meilleures offres de colocation et de coliving . La preuve que le coliving, logement flexible par excellence, peut devenir un mode de vie.
Les raisons de l’expansion
Davantage de demandes
Les coliving se multiplient aujourd’hui un peu partout dans le monde et ce n’est pas un hasard. Les tensions sur le marché locatif se sont accentuées. La demande locative a augmenté de 32%. Les petites surfaces sont, comme d’habitude, l’objet de toutes les convoitises. En moyenne en France, Bien’Ici compte 87 demandes pour un studio à louer pour 50 offres en 2021. « La location occupe une place importante du marché immobilier français, rappelle la plateforme. (…) Elle concerne environ 40 millions de personnes en France soit bien plus de la moitié de la population. »
Côté financier, le coliving présente des avantages : mutualiser les espaces communs et certains services comme le wifi, le ménage… Il permet de vivre dans des logements plus vastes et plus confortables et accueillants. En moyenne, si le loyer en coliving est égal ou légèrement supérieur à celui d’un studio, c’est surtout en raison des services mutualisés (charges, wifi, assurances, événements, abonnement Netflix, paniers bio hebdomadaires, voire cours de yoga ou de cuisine…) non couverts dans le cadre d’une location classique.
Résultat ? Le concept plaît. La voie, ouverte par des starts up comme Colonies, La Casa ou Sharies, est devenue royale. Selon une étude de BNP Paribas Real Estate, de 8 300 places en coliving en France en 2021, nous arriverions à 15 000 en 2023. Et le mouvement s’accélère. Par exemple chez Sharies : « En 2022, nous avons ouvert 300 places, 1 200 en 2023 et nous en prévoyons 3 000 en 2025. »
Des projets immobiliers spécifiques
Les premiers colivings ont été ouverts dans de grands appartements ou des maisons individuelles. Le coliving s’installe maintenant dans des immeubles entiers. Dovevivo, l’un des premiers opérateurs européens, transforme en coliving d’anciens immeubles de bureaux à Asnières… Certaines résidences sont construites spécifiquement comme le coliving étudiant de Paris Saclay.
Comment réagissent les mastodontes du secteur immobilier ? Vinci, avec sa filiale Bikube, a ouvert une première résidence de coliving à Lyon dédiée aux étudiants et prévoit l’ouverture, fin 2024 d’une autre résidence à Montpellier.
Le mouvement touche tout le monde. A l’échelle individuelle, de plus en plus de bailleurs transforment leurs colocations en coliving. Le bail de colocation ne comprend plus seulement un logement, mais aussi le wifi, parfois le ménage et d’autres services : home cinéma, salle de sports… Mais certains opérateurs de coliving vont plus loin : cours de yoga, de pilates, de cuisine, service de location de bicyclettes…
Coliving et colocation, y-a-t-il encore des différences ?
Le nom change bien sûr, mais dans les faits, il n’y a pas de différence. Qu’il s’agisse de coliving ou colocations, tous sont soumis à la loi de 1989 sur la location
En revanche, il existe une différence entre les coliving gérés par des entreprises et ceux gérés par des bailleurs. Lorsque vous habitez dans un coliving géré par un opérateur, en cas de problème au sein du logement partagé, vous avez un contact dédié. C’est l’entreprise qui assure l’entretien courant. Si votre bailleur est votre propriétaire, il mettra en place un processus pour gérer la situation et l’entretien courant.
Le coliving ou le renouvellement de la colocation classique
Une déco plus recherchée
Oubliez donc la déco faite de bric et de broc (style l’appartement de l’Auberge Espagnole). Coliving et colocation mettent aujourd’hui un point d’honneur à proposer des logements confortables, accueillants, design… Avec cette touche d’originalité dans laquelle il est si important que chaque résident puisse se projeter, insiste le sociologue Stéphane Hugon, fondateur du cabinet Eranos, afin de rendre concret les échanges et le vivre ensemble.
Préserver l’intimité
C’est le fondement de la colocation comme du coliving : votre espace privé avec votre chambre, votre propre salle de bain. En effet, selon l’enquête One Shared House 2030 publiée en 2017, la salle de bain ne doit pas être partagée. Est-ce le cas uniquement dans les coliving gérés par les entreprises ? De plus en plus de logements partagés gérés par des particuliers proposent chambres et salle de bain individuelles, comme les y encouragent la société Colocatère. Certains vont plus loin. Chez Around, à Aubervilliers, « nous faisons en sorte d’assurer la tranquillité de chaque colocataire, avec l’isolation phonique des murs, de la porte et du plafond. Les descentes d’eau passent loin des chambres, de façon à permettre à chacun de vivre sa vie comme il l’entend. Par exemple, de pouvoir prendre sa douche à minuit sans gêner ses voisins » explique Guillaume Ricour-Dumas, son concepteur.
Et plus de services
On les appelle encore colocation, mais il est courant d’y trouver home cinéma, salle de sports, jardin, voire un studio de musique si c’est une colocation à thème. Certains services de base comme le wifi sont compris dans le bail.
La caution solidaire et le bail collectif courant autrefois disparaissent. A la place, des systèmes de caution, comme la garantie COOLOC qui assure le règlement du loyer même en cas de défaut d’un colocataire facilitent les relations entre bailleurs et colocataires
Coliving, colocation : le vivre ensemble
Dans un marché immobilier en tension, le coliving présente des avantages. Mais qu’en est-il du vivre ensemble, de la communauté, bref du « co » de coliving ?
Que ce soit la colocation ou le coliving, le choix du vivre ensemble ne relève pas du hasard répond Stéphane Hugon. « Il faut se placer à l’instant antérieur à la colocation ou au coliving pour comprendre quel est le problème dont il est la solution, qu’il s’agisse d’une rupture familiale, de l’ennui, de la volonté de ne plus être seul ou de pragmatisme. »
L’expérience, en coliving comme en colocation montre que tout dépend des résidents. Ce qui rend l’expérience unique, ce sont des colivers ou des colocataires sur la même longueur d’onde, prêts à partager non seulement un logement, mais surtout la vie qui va avec !